Imaginer la nouvelle année

DSC_4437-3.jpg

Nous voilà engagé dans une nouvelle année en instruction libre, la 4ème ! 
Et comme à chaque début, alors que septembre se profile à l’horizon, je ressens une envie, un besoin de planifier, d’ordonner, de ranger et de fixer certaines choses pour plus de stabilité et de sécurité.
Je ressens le besoin de rediriger mon attention sur la manière d’accompagner mes filles dans leurs apprentissages. Non pas qu’elles n’aient rien appris pendant les deux mois d’été, loin de là, mais le retour à une routine plus régulière se fait sentir chez tout le monde.

Étonnement c’est Émy qui me le réclame ; elle qui, la première, part en râlant quand je lui demande de venir étudier un moment avec nous. Quand je me suis posée, avec mon cahier et mon crayon, pour noter mes idées pour l’année à venir, Émy m’a rejoint. Avec ses idées, ses envies, son besoin de planifier et de mieux structurer les journées. Elle m’a demandé de lui acheter un cahier de travail pour la lecture et l’écriture et souhaite l’inscrire au programme quotidien.
Pour ma part, après 3 ans d’instruction en famille, je n’ai jamais réussi à suivre, avec l’une ou l’autre de mes filles, un manuel du début à la fin. C’est comme pour les recettes de cuisine, je ne peux pas m’empêcher de les modifier à ma sauce, selon mon inspiration ou selon ce qui se trouve dans le placard. Et comme pour la recette, j’aime mieux avoir un principe directeur, une ligne de conduite qui va me permettre ensuite de faire à mon idée, plutôt que de suivre un programme à la lettre. Se contraindre à suivre un programme ne laisse pas la place à l’imprévu, et rapidement, on peut avoir le sentiment de ne pas y arriver et d’être en retard. À quoi bon.

Je parle déjà de notre rythme dans ce billet, et je pense que nous allons continuer dans cette direction pour cette nouvelle année.
Je tiens à avoir une forme, une routine pour « encadrer » notre instruction libre. Je crois profondément que l’on peut trouver la liberté dans un cadre et que d’une certaine manière c’est même plus sécurisant et motivant que sans cadre du tout. D’ailleurs les filles me le montrent souvent, comme Émy en ce moment, ou Liv qui a toujours besoin de savoir ce qui va se passer. Si elle peut se référer à notre agenda, ça la rassure… Alors même si ce sont de plus en plus souvent les filles qui organisent les journées, elles le font à l’intérieur de notre petite routine familiale.
Je travaille par ailleurs beaucoup pour créer une atmosphère propice aux apprentissages en veillant au développement individuel de chacune de mes filles.

Je commence donc en début d’année par faire une liste, en pensant à quoi pourrait ressembler nos journées et créer un rythme en conséquence.
Je me permets de rêver grand, d’imaginer sans limites ma journée idéale. C’est aussi le moment de revoir les valeurs à transmettre au sein de notre famille ; et puis... quelles ont les capacités de mes enfants à prendre en compte, à accompagner, à soutenir ?... Et quelles sont leurs failles, où ont-elles besoin de placer leurs efforts ? Quelles sont les routines, les habitudes, les ressources qui vont nous aider ?
S’il est important pour moi de créer un rythme chez nous, ce n’est pas du tout dans l’idée de figer les choses et les apprentissages. Le rythme n’est pas incompatible avec les apprentissages naturels des enfants. Un rythme bien construit et fluide nous libère l’esprit, nous permettant de danser librement. Et ce besoin d’organiser n’est pas motivé par des obligations ou une pression extérieures, c’est une réponse à ma responsabilité de créer un environnement d’apprentissage motivant et soutenant les intérêts de mes enfants.

Alors concrètement ça donne quoi ?
Eh bien... pour le moment c’est encore un fouillis d’idées, dans lequel je dois faire des coupes pour simplifier. J’ai prévu de réaliser un planning aimanté pour ne pas avoir à refaire notre semainier à chaque fois que l’on change quelque chose ; ce qui arrive plusieurs fois dans l’année. J’imagine une grande feuille avec les jours de la semaine, des aimants sur lesquels j’inscrits les thématiques de travail que nous souhaitons faire régulièrement, et ensuite, à nous de les placer dans la semaine comme désiré : Nature study, Wild Explorer Club, Poetry tea time (un petit nouveau), Story of the world, Read aloud, Book Club, Library....

L’année dernière j’avais proposé aux filles l’idée de travailler sur un sujet durant une période plus ou moins longue, pour pouvoir creuser et explorer plus en détails. Nous allons poursuivre sur cette voie, car les filles avides de découvertes, avaient beaucoup aimé travailler ainsi, faisant elles-même des ponts avec d’autres sujets, des liens avec leurs connaissances acquises, apportant aussi des idées.
Nous n’allons pas fixer de durée pour l’étude d’un sujet, cela ira d’une semaine à un mois probablement, en fonction de leur motivation. Pour ces sujets, les filles noteront ce qu’elles ont envie dans leurs cahiers, nous ferons des lapbooks, nous lirons des livres, nous regardons des documentaire et ferons des sorties…
Cette façon de fonctionner est à mon sens un bon moyen d’aborder les connaissances d’une manière très globale, où tout peut apparaître relié. Nous ne faisons pas 1h de géographie, puis 1h de physique et 1h de mathématiques, sans avoir la chance de comprendre que tout est interconnecté.

Je ferai un billet sur les sujets que nous étudierons après en avoir discuté avec les filles. Mais je ne vais certainement pas établir un planning, il sera plutôt composé au fil du temps selon les occasions qui se présentent. C’est certainement plus intéressant ainsi ; laisser la place pour que les intérêts naissent et éclosent. Cependant préparer un sujet demande du temps et ne peut pas être fait la veille pour le lendemain. Il faut quand même prévoir un minimum, ce que je vais essayer de faire avec les filles.

Mais dans tous cela, dans cette envie de planifier et de maîtriser un peu les choses, il ne faut pas oublier que les apprentissages suivent un processus naturel, et que nous pouvons facilement tuer ce processus si nous n’y prêtons pas attention. Au moment où j’écris, les filles ont pris le téléphone de leur papa et regardent le temps et les températures dans différentes villes du monde. Ainsi, elles font de la géographie et elles découvrent avec étonnement qu’à Sydney, il fait nuit et qu’il ne va faire que 17°C dans la journée. Après la phase de surprise, cela leur parait évidement, ... ce n'est pas l'été chez eux. 

DSC_4440-4.jpg

Avec Liv qui grandit, je peux voir maintenant la quantité de connaissances qu’elle a engrangées d’elle-même au fil des années. Plus petite n’était pas capable de partager ce qu’elle savait, car il faut un moment de maturation avant que les connaissances puissent ressortir. À 10 ans, je vois un changement s’opérer et une plus grande faciliter à utiliser et partager son savoir. Elle me parle souvent de ce qu'elle a appris en lisant.
Elle dirige de plus en plus ses apprentissages et parvient à une certaine indépendance, et elle en a besoin. Elle apprend énormément en lisant, ce qu’elle a la chance de pouvoir faire autant qu’elle le souhaite, et je dois par conséquent lui fournir de la matière pour ses lectures. Étant douée d’une mémoire impressionnante, elle se souvient de tout ce qu’elle lit, c'est un réel atout.
Je n’ai donc aucune inquiétude vis à vis de la lecture, l’écriture, la grammaire (qu’elle comprend instinctivement) ou l’orthographe. Elle adore également l’histoire et me réclame souvent que je lui lise The Story of the World que je traduis pour elle.
Liv s’intéresse aussi beaucoup à la mythologie et nous avons lu ensemble cette série, très bien faite. Elle n’a rien oublié, alors que moi… j’ai toujours du mal à démêler les liens qui unissent tous ces personnages de la grande famille de l’Olympe !

Ce sont les maths qui intéressent le moins Liv, et elle n’aime pas du tout les exercices, répétitifs et sans intérêts pour elle, que l’on peut trouver dans les manuels. Je dois travailler autrement avec elle, en lui faisant des leçons moi-même (en m’inspirant d’un livre bien sûr) mais de façon à y intégrer le dessin, et en accompagnant cela de manipulation de matériel. Je n’ai pas de formation Montessori en maths pour sa tranche d’âge, je vais devoir faire à ma sauce...
Et cette matière n’étant pas non plus ma tasse de thé, j’ai plus de mal à la motiver que pour d’autres sujets qui me passionnent, et je sais bien ce qu’elle ressent : une certaine distance avec les chiffres, qui ne lui parlent pas. Nous allons tenter de mieux les apprivoiser et de les aimer, ensemble !
Ce livre nous permettra d’aborder les mathématiques sous un autre angle, celui de l’histoire, qu’elle aime tant. En revanche, Liv aime beaucoup la géométrie, que nous continuerons, avec l’aide de ce livre parfait.

Quant à Émy, elle me réclame de la routine après cette longue période estivale, mais en même temps je la connais… sauvage et libre ! Nous verrons bien comment concilier ces deux aspects.
Elle doit cette année se concentrer sur la lecture et l’écriture, elle le sait et elle veut faire des progrès. Il n’est pas question de la forcer, mais de se fixer un objectif à atteindre.
Nous avons mis en place une petite routine matinale pour démarrer la journée : lire et écrire une citation et en discuter. Ce peut être aussi un petit texte sur une thématique telle que la gratitude, l’entraide, l’amitié, la jalousie… pour aborder des notions porteuses de valeurs essentielles.
De même, en fin de matinée ou début d’après-midi, nous faisons un petit temps de lecture de 10, 15 minutes, avec chacune notre livre. Après la lecture, nous nous racontons ce que nous avons lu. C’est l’occasion pour Émy de lire avec une motivation, celle de nous partager sa lecture. Elle adhère pour l’instant.
Elle lit Öko de Mélanie Rutten, Liv lit Robot sauvage de Peter Brown, et je lis Storm in a teacup de Helen Czerski.

Hier nous avons testé une nouvelle idée : le Poetry tea time. Il s'agit de partager un bon goûter et un bon thé sur une jolie table et de lire des poèmes. Quand j'ai présenté la chose aux filles, Émy était ravie et a tout de suite cherché un livre parmi ceux que j'avais emprunté à la bibliothèque. Liv a dit ne pas avoir envie de lire de la poésie, et a commencé à se refermer comme elle sait bien le faire quand ça ne lui plait pas. Je lui ai dit qu'elle pouvait apporter tous les livres de son choix à la table. Ça l'a détendue et nous nous sommes installées pour lire et choisir une poésie (ou plusieurs) à partager en la lisant à voix haute. Liv finalement a trouvé des petits livres avec des poèmes qui lui plaisaient et a participé. Mais elle a surtout écouté au début.
Le livre que j'avais choisi, Jouer avec les poètes, propose des petits jeux, dont un mot croisé de palindromes. ll n'en fallait pas plus pour éveiller l'intérêt de Liv, qui aime les mots.

Cependant, tout cela est encore à l’état de brouillon, et nous devons prendre un peu plus de temps ensemble pour poser les choses. Planifier demande un peu de travail au départ, mais cela aide ensuite à éliminer du stress et finalement permet d’apporter plus de liberté à nos journées. Les filles sont contentes de le faire avec moi.
Elles ont aussi un petit carnet dans lequel elles notent, avec une case à cocher devant, les choses qu’elles aimeraient faire le lendemain ou un autre jour. Je peux y ajouter également des idées, qui ne sont jamais des obligations. Cela leur permet de se référer à cette liste si elles ne savent pas quoi faire et elles cochent la case quand c’est fait. Elles mettent des idées de bricolage, de jeu, de lecture, de recette, de sortie… mais c’est rarement un exercice de maths !

Merci d'être arrivés jusqu'au bout de ce long billet, écrit peut-être plus pour moi que pour vous, vu l'état d'avancement de notre planning ! Mais écrire me permet de mettre les choses au clair dans ma tête. Parfois (souvent même) je ne sais pas ce que je vais écrire, et c'est en écrivant que je comprends où j'en suis. L'écriture est un moyen pour moi de "savoir" ce que je fais instinctivement, de mettre des mots dessus. C'est bizarre non ?